Peut-on ressentir de l’empathie a l’égard d’un robot ? C’est avec ce genre d’interrogation que le monde se préparait à recevoir la déferlante robotique, peu avant les années vingt.
Si aujourd’hui on ne se pose plus la question – les enfants sont élevés par des robot-nurses qui évoluent avec la croissance de l’enfant et les escort-bots ont mis fin la prostitution de rue – il est étonnant de voir l’aveuglement dans lequel nos parents se sont enfermés malgré les prémices objectifs d’une empathie tout à fait possible de l’humain à l’égard de la machine.
Dans les années 2014-2015, les fabricants de robots diffusaient un grand nombre de vidéos montrant les talents d’équilibristes de leurs robots. Les plus évocatrices de cette quête d’un sentiment non identifié à l’époque concernaient les machines zoomorphes développés pour l’ancienne DARPA américaine, pour accompagner et soulager le soldat de son package, en opération, au sol. Pendant que la France travaillait sur un exo-squelette individuel, les américains s’apprêtaient à doter leurs soldats d’une bête de somme capable de s’accommoder de n’importe quel terrain et surtout de s’adapter à n’importe quel interaction avec son environnement, comme un cheval, un âne le ferait.
Pour montrer le degré de perfection qu’ils étaient en train d’atteindre, les concepteurs de ces zooïdes quadrupèdes n’hésitaient à donner de grands coups de pieds dans les machines qui, dans une danse quasi animale, retrouvaient après quelques secondes leur équilibre pour se remettre en marche, en suivant un leader humain ou bien au sein d’essaim de machines.
Aujourd’hui, ceux qui se souviennent encore de ces images vous le diront : « On avait beau savoir que ce n’était que des machines… Les voir se démener sous les coups de leurs concepteurs, pour garder leur équilibre… Malgré nous, ça nous faisait mal au ventre ! » Pourquoi ? Mais, par ce que ces machines bougeaient, réagissaient selon des codes visuels que l’on retrouvait dans le monde animal. D’autant que, à la même époque, les animaux sauvages, en général, mal menés par les dérèglements climatique attiraient facilement les sympathies humaines. Les robots zoomorphes en bénéficiaient par une capillarité affective qui, bien que, aujourd’hui, elle nous semble naturelle, à cette époque de notre histoire contemporaine, elle était considérée encore avec étonnement, voire contre nature.
Alors, oui : l’homme est capable d’empathie à l’égard de la machine. Cette assertion est d’autant plus facile à vérifier avec nos machines contemporaines qui singent les organismes biologiques avec un mimétisme toujours plus marqué et troublant pour certains d’entre nous. La seule question à laquelle notre modernité n’a pas apporté de réponse est de savoir si cette empathie, ce sentiment de compassion à l’état de la machine dotée d’intelligence artificielle, est légitime. Et c’est un débat qui mérite d’être lancé !