Olivier est un des invités du numéro 7 du magazine Ecko*. A consulter en ligne sur le site du magazine (www.ecko-mag.com), à lire en version papier pour les chanceux de Bourgogne et à compulser ou à télécharger en version pdf ici : https://issuu.com/ecko-magazine/docs/ecko7_issuu/60
Les chroniques sont à consulter dans les pages INNOVATIONS d’Ecko Magazine.
« Dis-moi ce que tu consommes, je te dirai quel avenir tu te prépares », paroles de prospectiviste…
Les intelligences artificielles sont partout et le seront d’avantage demain, parole d’analystes. D’ici 2025, les marchés liés aux IA se compteront en dizaines de milliards d’euros, sachant que les IA d’aujourd’hui ne sont rien en comparaison des promesses prêtées aux futures générations d’IA !
Alors que le monde n’est témoin que du début du déploiement des IA dans le quotidien de l’humanité, il n’est pas inutile de faire un point sur la compréhension que l’on peut avoir de ce qui est tout à la fois une science fondamentale, une technologie qui ne cesse de se réinventer et un marché en perpétuelle évolution.
Ainsi, les IA peuvent être classées en trois catégories. Il y a les intelligences artificielles étroites, ou mono tâche — on pourrait même parler de systèmes experts — comme Deepmind qui a battu les meilleurs joueurs au monde du jeu de Go ou Watson qui aident les médecins dans leur diagnostiques en plongeant dans l’ensemble des publications médicales en quête d’informations pertinentes et inaccessibles à un humain tant le nombre de données est grand. Une autre IA, Ross, fait de même en droit, pour les avocats, en plongeant dans les lois, les décrets et autres jurisprudences en quête de sens. Il y a ensuite les IA générales qui, un jour, seront capables de gérer la complexité qui est le quotidien d’un humain sachant que celui-ci accomplit une bonne partie de ces tâches de manière plus ou moins consciente (marche, lecture, discussion, cuisine…). En dernier lieu, il se pourrait qu’un jour émergent les super IA qui, par leurs capacités, pourraient dépasser l’ensemble de l’humanité.
DES IA PARTOUT MAIS PAS TOUJOURS VISIBLES
Indépendamment de leurs catégories, les IA seront dédiées à une interaction avec un ou plusieurs humains, localisées dans un objet, comme les assistants numériques dans les smartphones contemporains ou dans les robots de demain qui assisteront les pompiers ou les personnes âgées ou dépendantes, qui éduqueront les petits d’homme, en oubliant pas que ces machines seront nécessairement connectées aux réseaux et aux autres IA. Ou bien, les IA seront déployées dans les réseaux, invisibles des humains mais à l’œuvre en permanence comme le sont les IA qui présentent les réponses les plus pertinentes aux utilisateurs d’un moteur de recherche, comme celles qui gèrent au mieux les stocks d’une entreprise de distribution, comme le seront, demain, les IA qui géreront le trafic automobiles, tout d’abord au travers des feux tricolores puis en relation avec les IA des futurs véhicules autonomes.
De ces trois catégories d’intelligences artificielles, aujourd’hui, seule la première est effective. On peut s’adresser à son smartphone, il comprend tant bien que mal les ordres qui lui sont donnés, il écrit plus ou moins bien ce qu’on lui dicte… mais, versions après versions, les progrès sont constants. L’industrie – services et production – est également gourmandes des IA déployées. Concernant les deux autres types d’IA, elles demeurent, à ce jour, hors de la portée de l’humanité, aussi bien pour des raisons de matériel et de puissance que pour des considérations conceptuelles et de programmation. Mais les recherches avancent à grand pas, que l’on parle des réseaux neuronaux artificiels qui imitent le comportement du cerveau biologique, et qui permettent le deep learning ou machine learning, l’apprentissage autonome de l’IA, ou que l’on considère les ordinateurs quantiques qui à terme pourraient mettre à disposition des IA des puissances inaccessibles avec les technologies actuelles. En effet, et ce malgré l’ingéniosité des fabricants de microprocesseurs et d’ordinateurs, en matière informatique, l’humanité se heurte à un plafond de verre technologique, et la célèbre loi de Moore, qui a longtemps prévu le doublement du nombre de transistors dans les microprocesseurs tous les 18 mois (loi simplifiée pour finalement annoncer le doublement des puissances dans le même intervalle de temps), cette loi, dans les faits, est en passe de ne plus être vérifiée.
DES PROGRÈS QUI DÉPASSENT LES PRÉVISIONS
Cependant, concernant les IA, les faits, eux, montrent que les progrès dépassent toujours les prévisions. Si bien que les IA ne cessent d’étonner par leurs prouesses, fascinent par les promesses qu’elles portent (promesses de progrès social, promesses économiques, promesses environnementales…) et font néanmoins peur pour les mêmes raisons qu’elles fascinent : les promesses de IA ne portent-elles pas en elles les germes d’un risque d’aliénation pour l’humanité tant la concurrence entre les intelligences biologiques et artificielles semble être vouée à tourner à l’avantage de l’intelligence artificielle ?
Et pourtant que l’on parle d’IA générale ou de super IA, il se trouve une question essentielle qui, aujourd’hui, demeure sans réponse : une intelligence artificielle sera-t-elle un jour consciente d’elle-même ? Une intelligence artificielle pourra-t-elle être un jour qualifiée de conscience autonome ? Quand les IA passeront-elles d’intelligences artificielles faibles (sans conscience d’elles-mêmes) à fortes (capables d’éprouver une réelle conscience de soi en plus de produire un comportement intelligent), quand adviendra la Singularité chère aux Transhumanistes ? Car si l’humain, entité biologique unique, non réplicable et consciente de sa finitude, tant physique que temporelle… si un humain, les yeux clos, a pu un jour dire en lui-même « cogito ergo sum » pour, ensuite en témoigner auprès de ses semblables, concernant les IA, il demeurera toujours un doute : “Et si les actions, les réactions et les interactions des IA avec l’humanité n’étaient que le produit d’un programme infiniment complexe mais, finalement, ne faisant que singer avec talent les comportements et la conscience humaine ?” Sachant que si un tel doute était levé en faveur de la « singerie » — si, un jour, une machine énonçait : “Computo ergo sum” — l’humanité aurait alors moins de scrupule à éteindre une machine jugée dangereuse…
DES QUESTIONS ETHIQUES QUI RESTENT EN SUSPEND
En attendant de trouver une réponse satisfaisante à cette question, il est bon de rappeler que, de tout temps, les animaux, comme n’importe quelle forme de vie, ont été « pilotés » par leur instinct de survie. Puis, en son temps, l’humanité a transformé cet instinct primaire (toujours présent au cœur de l’homme) pour en faire le progrès (notion aujourd’hui discutée) et les cultures humaines, la compétitivité et la solidarité qui protège l’individu au sein de la communauté… Mais, dans les cas des IA, qu’est ce qui les pilotera ? Quel sera leur tropisme ? Plus d’efficacité ? Plus de puissance ? Moins d’humanité ? Et toutes les IA fortes qui sont en voie d’être développées, déployées, agiront-elles toutes en direction d’un même but ? Si la concurrence entre intelligences est une fatalité, l’humanité ne sera-t-elle pas un jour le témoin passif d’une guerre informatique entre IA, conflit qui se déroulera à des vitesses inaccessibles à l’entendement biologique ? Et cette guerre informatique pourrait-elle faire de la Terre un champ de bataille plus vraiment numérique ?
Au delà de la seule comparaison en termes de puissance, qui indéniablement penche en faveur des IA, il est une autre différence entre les IA et les humains : c’est celle de la la perception et la pondération du travail. Les machines ne mesurent pas la quantité d’énergie consommée pour accomplir une tâche, ce qui, chez les êtres biologiques, se manifeste par la fatigue. Les IA n’ont pas conscience des contingences matérielles et pourtant elles dépendent des infrastructures et des moyens mis en place, mis à leur disposition par l’humanité. Si bien que, si on intègre ces limitations matérielles, énergétiques, structurelles, les intérêts des IA ne convergeraient-ils pas vers ceux des humains pour lutter contre l’entropie propre à tout système, entropie qui concerne l’humanité aussi bien que les IA ?
VERS DES IA COLLABORATIVES ?
Finalement, même s’il demeurera toujours le risque d’une mauvaise utilisation des IA par certains humains, risque inhérent à tout outil créé par l’humanité (il n’y a pas de valeur morale dans un outil, même l’énergie nucléaire toute dangereuse soit-elle), même s’il demeurera toujours le risque d’une émancipation incontrôlée des IA devenues autonomes, risque que même des lois informatiques morales, comme les 3 lois de la robotique d’Isaac Asimov, pourraient bien ne pas circonvenir, une IA à qui on aurait appris la frugalité énergétique pourrait bien devenir, à terme, le meilleur collaborateur qu’ai trouvé l’humanité afin de relever les défis de demain, car de telles IA, ouvertes à une nécessaire collaboration pour réduire la consommation énergétique, seraient conscientes de profiter aussi bien des infrastructures mises en place par les humains que de partager un même écosystème indispensables à leur propre pérennité : la planète Terre.
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